Le CRM : outil de motivation des équipes

La motivation des commerciaux et des équipes de vente

Comment s’assurer de la motivation des équipes quand les études montrent que 70% des salariés ne se sentent pas investis dans leur travail ? le digital est-il une solution ? Au sein des équipes commerciales, le CRM a conquis tous les grands groupes mais 73% des PME n’utilisent pas le CRM. Peuvent-elles utiliser cet outil pour inventer de nouvelles façons de motiver leurs équipes commerciales


organisation commerciale

Année après année, les études confirment que les salariés se sentent désinvestis de leur travail. Seuls 6% sont réellement engagés au quotidien, d'après l'institut Gallup. Dans les entreprises, on assiste à un turn-over important, avec des dépenses toujours plus grandes pour essayer de recruter des bons éléments. Le risque est que les objectifs de chiffre d’affaire d'une entreprise ne soient pas atteints, et que ses stratégies commerciales ne soient pas réalisés. Quels sont les outils que doivent utiliser les dirigeants ? Est-ce que le digital et le CRM peuventt aider les entreprises à renouveler leur pratique managériale ?

Les promesses du CRM

Dans le domaine commercial, le CRM est l’outil digital principal. Depuis vingt ans, il irrigue la digitalisation des entreprises. Si 75% des PME ne sont pas équipés d’un CRM, elles sont plus de 50% avec des projets de CRM (étude SAGE). Dans les entreprises plus importantes, le CRM est devenu un outil quotidien.

Sur le papier, les promesses des logiciels CRM sont très attractives. La valeur d’un CRM, c’est d’unifier les données clients. Le leader du secteur, SalesForce, promet d’offrir « une vue unifiée de vos clients sur une plateforme intégrée », Microsoft Dynamics annonce lui pouvoir « unifier les données ».

Le deuxième intérêt, c’est de pouvoir intégrer actions marketing et plan de vente. « Optimisez votre efficacité commerciale, créez des campagnes marketing ciblées » nous dit SAGE. L’intégration des différentes applications : marketing, vente, service-client est un des drivers des projets CRM.

Tout cela évidemment au service de l’efficacité. « Donner des visions prédictives, aboutir à des résultats exceptionnels ». Voilà le programme. « Make smarter decisions ». Prendre des décisions plus intelligentes, qui refuserait une telle promesse ?

Le CRM est un outil à trois dimensions:
imgAnalytique. En rassemblant les données commerciales, il permet de réaliser automatiquement des analyses des données de l’entreprise. Il peut être utilisé pour calculer des scoring clients et permettre une meilleure segmentation, ou réaliser une étude poussée pour mieux préciser sa stratégie commerciale.
imgOpérationnelle. Le CRM aide à avoir une vision unifiée de toutes les interactions client. Les moments d’interaction (téléphone, email, visites) sont notés et conservés et permettent de mieux contrôler les échanges avec ses clients.
imgCollaborative. Il facilite les interactions entre les clients et l’entreprise.

L’outil CRM permet donc de mieux gérer des projets de marketing relationnel, où le cœur de la stratégie est la création d’une relation individualisée avec ses clients. En ce sens, toute entreprise, quelle que soit sa taille, devrait avoir un outil digital CRM.

Les risques du CRM

Toutefois, un projet CRM comporte quelque risques. Dans une étude Hubspot – ainsi que les discussions que nous menons avec nos clients - les dirigeants commerciaux mettent en avant plusieurs points.
imgLa fraicheur des informations. Avoir une base de données qui vieillit avec des données obsolètes ne permet pas de suivre les clients de manière efficace. Et il n’y a pas de solution simple d’update automatique des données.
imgL’intégration. Pour qu’un CRM donne ses fruits, il doit être interfacé avec les autres logiciels de l’entreprise. Or c’est souvent un projet complexe et cher.
imgLe choix. Tout simplement au moment de mettre en place le projet, il faut choisir un éditeur. Or il y a pléthore d’offre. Et comme ce choix est très structurant de la suite de ses investissements informatiques, il reste difficile de faire un choix éclairé.

Couramment, l’intégration du logiciel au sein du SI complexe reste un défi important. Le logiciel doit d’interfacer facilement aux strates différentes de logiciel dans l’entreprise : de la bureautique Microsoft, de l’ERP OpenSource, des logiciels comptables anciens, des nouvelles offres en marketing, il faut un pilote chevronné pour réussir cette intégration. Pour avancer rapidement et à coût maitrisé, certains essaient de livrer rapidement un proto-outil. Le réglage fin de cet outil va demander ensuite des semaines de travail et coûter très cher. Or c’est bien l’inverse qui est recherché: un outil d’amélioration à court terme des performances.

Du point de vue de l’utilisateur, la mise en place d’un CRM peut aussi devenir un risque.

D’abord l’interface peut être complexe. Entrer les informations, lire les informations, interagir avec le logiciel peut rapidement être difficile ou contre-intuitif. Si ces interactions deviennent pénibles, les utilisateurs, après quelques essais, reviendront à leur pratique précédente. On entre alors dans une phase de « résistance » à l’outil.

Ensuite le CRM peut rajouter une couche de travail administratif. Lorsque les pratiques précédentes ne sont pas changées, le CRM ajoute une couche d’obligation : saisir des activités qui sont déjà réalisées, changer en permanence les données des clients, trouver comment produire un rapport selon le format demandé par sa hiérarchie. Si le projet CRM aboutit à une addition de travail administratif, le CRM devient contre-productif pour la motivation.

Lorsque les salariés travaillent dans une ambiance tendue, où le risque de reproche ou bien le ressenti de sanction est très important, le CRM apparait comme un outil au service de cet objectif, c’est-à-dire un outil de flicage, qui sert à contrôler et pas à améliorer les performances d’équipe.

Les objectifs de l’entreprise

Or, une entreprise met en place un CRM pour améliorer, automatiser sa stratégie de conquête et fidélisation client. Elle a besoin de se différencier, d’anticiper les changements. Elle veut piloter les actions, d’établir des processus et de mesurer ses coûts.

L’objectif d’un projet CRM est de pouvoir mieux gérer l’information, mieux organiser ses équipes et essayer d’automatiser les campagnes marketing, tout en étant rentable, évidemment. Dans ce cadre, un CRM est un outil essentiel pour nourrir cette stratégie d’entreprise moderne. Est-ce que ces objectifs sont conciliables avec une motivation des utilisateurs ?

Les besoins des commerciaux

Les équipes commerciales ont, elles, des besoins bien identifiées. La première demande est une centralisation de l’information. « Rien n’est plus désagréable que d’avoir un client au téléphone et qu’il m’apprenne qu’il a appelé le service-client » exprime Laura, technico-commerciale dans l’industrie. Tout savoir sur ses clients permet une fluidité des échanges, une meilleure maitrise de la relation avec son client et in fine d’améliorer le service rendu. « Centraliser les informations, c’est la condition de la fidélisation de nos clients » affirme Nicolas, directeur commercial dans l’agro-alimentaire.

Une autre demande est de passer moins de temps à faire de l’administratif. Chaque mission d’un commercial possède des processus répétitifs : chercher le contact, écrire un compte rendu, noter la prochaine étape, etc. Un CRM bien conçu va pouvoir automatiser un certain nombre de tâches. Parmi celles-ci, la création de rapport est très intéressante. Afin de dialoguer avec sa hiérarchie, une équipe commerciale doit produire des rapports de vente. Dans les PME, une grande partie de ces rapports sont encore produit manuellement. La mise en place d’un CRM s’accompagne de la capacité de produire automatiquement de rapports commerciaux. Cela va dans le sens des besoins des utilisateurs.

Les aléas de la vie commerciale sont bien connus : les meilleurs prospects ne signent pas malgré tous les efforts fournis, la production a un problème de back-order et les promesses faites au client ne peuvent pas être réalisés, une réponse urgente à faire au client n’est pas disponible car d’autres services de l’entreprise ont d’autres priorités, etc. C’est dans ce schéma de contraintes que doivent travailler les commerciaux. Convaincre un client reste difficile et quand des éléments extérieurs empêchent de transformer l’essai en réussite, la motivation prend un grand coup dans l’aile.

Le CRM peut apporter des solutions de motivation en facilitant les tâches répétitives, en permettant un accès rapide à l’information et à améliorer l’échange d’information dans les équipes clients.

La motivation générale des salariés

De façon plus générale, les facteurs de motivation des salariés sont bien connus. La première demande c’est la reconnaissance. Ce n’est pas le salaire, le modèle de voiture de fonction ou bien le titre qui est important. 71% des cadres sont prêts à démissionner pour un poste avec un salaire plus faible, s’ils obtiennent une mission intéressante et de la reconnaissance (Hays 2017). Cette reconnaissance a plusieurs expressions. Humainement, les salariés ont besoin de contact, d’interaction, de feedbacks positifs pour se sentir reconnu. Le CRM doit pouvoir donner quelque chose sur ce point.

Dans les fonctions commerciales, on cherche aussi à avoir des critères objectifs d’évaluation. Rien n’est plus destructeur de la motivation que des entretiens d’évaluation négatifs, basés sur des impressions et des émotions. « Je ne t’ai pas senti très impliqué sur ce projet ». Les commerciaux sont en demande de critères objectifs d’évaluation d’un travail qui est souvent qualitatif, relationnel.

Les salariés veulent également participer plus activement à la stratégie et ne pas être cantonnés dans un simple rôle d’exécutant, appliquant des directives venues d’en haut. Cette demande est en forte augmentation avec l’arrivée des nouvelles générations. Ils veulent aussi pouvoir évoluer, développer leurs compétences au sein de l’entreprise.

Comment le CRM peut devenir un outil de motivation

Le CRM est au cœur d’un projet d’entreprise de rationalisation, de performance, de maitrise. Peut-on le mettre au centre du projet du motivation des salariés ?

L’automatisation des tâches par le numérique, c’est la première promesse d’un projet de logiciel. C’est pourtant une difficulté première, surtout dans des petites équipes, ou la diversité des tâches rend impossible toute modélisation formelle.

Lors de l’installation d’un CRM, on peut travailler le projet dans le sens des besoins de l’équipe.

On peut avoir deux tentations, prendre le CRM comme il se présente. Alors on impose de nouveaux processus qui correspondent aux contraintes de l’outil. C’est la solution la plus rapide mais celle qui créé le plus de résistance. L’autre tentation, c’est d’essayer de tordre l’outil pour correspondre aux processus de l’entreprise, en espérant automatiser les tâches actuelles. Le risque est alors de devoir dépenser dix fois le prix du projet dans des développements spécifiques qui vont prendre des mois.

Réussir un projet CRM nécessite sans doute des automatisations réalisées de manière itérative. On commence petit : on prend des processus qui ont été identifiés comme pénibles, inutiles, redondants et on concentre sur ces points les efforts d’automatisation. Lorsqu’une adhésion à ces premières fonctions est réaliser, on peut passer de façon itérative à d’autres tâches plus complexes.

La production de rapport de vente et de prévision de budget est souvent l’automatisation préférée. La fonction commerciale est l’objet de demande forte de rapport : rapport, prévision, etc. Et c’est vrai que ces données sont si structurantes de l’avenir d’une entreprise, que ces rapports deviennent la demande numéro 1 de la hiérarchie. On voit beaucoup d’équipes commerciales passer des heures à faire du copier/coller entre tableaux avec différents formats pour produire ces rapports. Le projet d’automatiser ces tâches reçoit le plus souvent une adhésion immédiate des équipes commerciales. En mode itératif, on peut donc commencer par ce sous-projet pour réussir un projet CRM.

Pour nourrir le besoin de reconnaissance que nous portons tous, il n’y a pas de recette miracle. Toutefois un projet CRM peut aider le manager à trouver quelques ingrédients. La posture à développer c’est d’utiliser cet outil pour améliorer la relation managériale et améliorer le travail en équipe.

Un aspect clef est de renouveler les facteurs d’évaluation. Dans beaucoup d’endroits, on répète que le rôle de l’équipe commerciale est de ramener du chiffre d’affaire et de ne pas s’occuper du reste. Un renouveau managérial doit interroger cette idée. Un CRM est capable de produire des ratios complexes, nouveaux. Il permet de créer des critères d’évaluation innovants. On peut imaginer non pas suivre simplement le montant des commandes, mais mesurer la satisfaction client, ou le taux de fidélité. Le marketing digital invente de nombreux ratios de performance sur les commandes par site web, il y a une mine à explorer pour inventer des mesures de performance, qui correspondent aux besoins de l’entreprise. Définir des objectifs rationnels, SMART, pour une équipe commerciale, en dehors des résultats de vente, peut être difficile. Avec un logiciel de centralisation des données, le manager développe des indicateurs clefs de performance plus complexe. C'est un outil au service d'un objectif de motivation des salariés.

Les meilleures pratiques de management sont d’ailleurs de ne plus mesurer le résultat de performance des ventes, mais les performances de l’action à travers des ratios calculés sur des intermédiaires : le taux de couverture des clients majeurs, le temps de réponse à des emails, etc. Dans une stratégie commerciale, le point essentiel est de rendre cohérent la mesure de l’efficacité avec ses objectifs commerciaux.

On peut créer des tableaux complexes qui donnent à voir la réalité du métier de commercial. Si ce tableau est utilisé comme outil de management, il est de nature à renouveler les motivations. « je regarde tous les ratio avec mes équipes » nous annonce Nicolas « et nous discutons des éléments à améliorer, on ne regarde même plus les résultats de vente ».

Evidemment si le CRM et le calcul des ratio est considéré comme un instrument de torture mental, en donnant des indicateurs de performance contradictoires et impossible à atteindre, des facteurs d’évaluation qui ne sont pas sous le contrôle de la personne évaluée ou de d’indicateurs clefs qui changent tous les matins, ce n’est pas la motivation qu’on va augmenter, mais le nombre de lettres de démission des meilleurs éléments.

Une autre pratique est de créer des ratios qui dépendent non pas d’une personne, mais du travail d’une équipe et de travailler en équipe sur ces ratios. « Lors de notre réunion commerciale hebdomadaire, nous regardons un taux calculé de satisfaction-client» nous dit Jean-Claude, directeur commercial dans le l’industrie. « Le CRM permet de mieux travailler en équipe en concentrant les discussions autour de problèmes concrets, mis en lumière par une analyse automatisée des chiffres. »

L’automatisation des tâches de saisie, de calcul et de présentation de donnée permet de dégager du temps pour un renouveau managérial. Les discussions du directeur commercial s’en trouve concentré sur des aspects plus haut niveau que le simple commentaire des chiffres de vente. En fournissant un référentiel objectif, il élude toutes les questions floues et permet de parler objectif, moyen, plan d’action, difficultés, etc. Le CRM permet de produire des données objectives, précises et prédictibles des actions mises en place par les équipes. « Le CRM permet finalement de dégager du temps pour l’humain » affirme Bertrand. En ce sens il devient un outil de motivation. « En plus, nous avons des données de résultat d’équipe, je m’en sers comme challenge d’équipe hebdomadaire ou mensuel ». Il rajoute « Les meetings commerciaux sont plus haut-niveau et les équipes ont l’impression de mieux contribuer à la stratégie commerciale ». Cet outil peut produire des analyses poussées de données. Il peut mettre à jour des aspects jusqu’à là invisible : des segments intéressantes mal travaillés, des leads oubliés. Le membre de l’équipe qui met à jour ces tableaux de bord se sent investi d’une contribution supérieure à la stratégie.

En automatisant les tâches bas-niveau, les rapports chiffrés, le travail administratif, le logiciel permet de renouveler les rapports humains entre un manager et son équipe. Pour réussir à utiliser le CRM comme outil de motivation, c’est avant tout une question de méthode managériale. On passe d’une méthode intuitive à une méthode plus précise, en objectivant le rapport aux informations. La motivation des salariés est un enjeu central, accessible par un changement d'attitude managérial. Le CRM peut devenir un outil central pour catalyser ce changement.